Interview de Laurent Boissonnas dans FAIRWAYS

Le Président du GEGF Laurent Boissonnas a été interviewé par le magazine Fairways où il a souligné les rôles cruciaux du GEGF et l’importance de sa pérennité dans une période déterminante qui présage un changement de comportement – sûrement nécessaire – dans la filière du golf en France…

Lire l’extrait portant sur le GEGF ci dessous:

AL: Vous êtes donc également à la tête du GEGF. Nous imaginons les chantiers nombreux mais quelle est la priorité ?

LB : Le GEGF est un syndicat qui défend des travailleurs et dont le premier rôle est d’animer le dialogue social dans la branche. Le golf est un secteur avec sa propre convention collective et il y a toute la vie paritaire qui va avec et donc le dialogue avec les partenaires sociaux sur les questions d’emploi, de formation, sur le social, etc…

Cela représente la mission première du GEGF. Ensuite, son rôle est d’assurer la pérennité et le développement économique de nos golfs. Avec l’évolution des enjeux ces dernières années, le GEGF a endossé un rôle plus large qui consiste notamment à sensibiliser aux risques systémiques qui sont les nôtres et de faire en sorte de trouver des solutions et de les diffuser auprès de l’ensemble des adhérents et des golfs à gestion commerciale que le GEGF représente. Nous travaillons main dans la main avec les autres acteurs de la filière… Et nous unissons nos efforts avec le GFGA (Groupement Fronçais des Golfs Associatifs), la PGA, la ffgolf, l’ADGF (Association des Directeurs de Golfs de France) et l’AGREF (Association Française des Personnels d’Entretien des Terrains de Golf) pour avoir le bon discours et le relayer de manière collective.

AL : Quelle est la stratégie concernant la question écologique ?

LB : Nous nous mobilisons pour bâtir un projet de golf responsable que nous allons assumer et diffuser auprès de l’ensemble de nos adhérents. Il existe le label Biodiversité créé avec le Museum d’Histoire Naturelle pour que les golfs puissent s’engager sur cette question. Nous avons participé à sa construction et sa simplification. Aujourd’hui, s’engager – concrètement il s’agit de s’inscrire sur une plateforme en ligne – est très simple et peu onéreux. Se faire labelliser coûte encore un peu d’argent – peut-être trop disent d’ailleurs certains – donc nous poussons pour obtenir des accords un peu plus larges avec des structures naturalistes pour que les golfs paient moins pour être labellisés. Nous savons à quel point nous avons besoin de valoriser la biodiversité, à quel point elle est importante pour les administrations, et que c’est la porte d’entrée pour toute autre action en faveur des golfs.

AL : Quel est l’état d’esprit de vos adhérents dans cette période particulièrement délicate ?

LB : Il y a une forme d’inquiétude. L’étude menée par Ernst & Young en 2018 sur l’impact économique de la filière golf en France disait qu’il y avait environ 60% des golfs qui affichaient une activité déficitaire. Nous avons donc une filière fragile, dans laquelle il y a 70% des entreprises qui comptent moins de 11 salariés…. Ce que nous vivons en ce moment est assez anxiogène car les charges augmentent partout et que les solutions pour augmenter les chiffres d’affaires ne sont pas à la portée de tous, soit parce qu’ils n’en ont pas conscience, soit parce qu’ils n’osent pas le faire. L’inquiétude est bien présente. Elle n’est pas nouvelle mais disons qu’elle est exacerbée en cette période car les défis – prenons l’exemple de l’irrigation – sont plus importants aujourd’hui qu’hier. La question des aides pour contribuer à ces investissements est donc cruciale.

AL : Quel est exactement le poids de la filière golf en France et l’impact d’un golf sur un territoire ?

LB : La filière golf en France pèse 1,5 milliards d’euros, directement ou indirectement. C’est à peu près équivalent au spectacle vivant. Entre 750 millions d’euros et 800 millions d’euros sont directement produits dans les clubs. La partie tourisme – toutes les retombées de ce que consomment les touristes lorsqu’ils viennent jouer au golf – génère 500 millions d’euros. Les 250 millions restants concernent le matériel, la communication, typiquement les médias, et l’événementiel. Il y a par ailleurs 15 000 emplois qui sont liés au golf, dont entre 9000 et 10 000 directement dans les golfs et resorts. C’est donc une filière qui est bien plus importante que ce que l’on pense. Avec de tels chiffres et n’en déplaise à certains, cela ne peut pas être une activité seulement réservée aux seuls nantis, une idée trop souvent véhiculée. Nous avons 442 000 licenciés, ce qui représente la 4ème fédération française devant le rugby, le basketball et ce ne sont pas 442 000 milliardaires. Il y a une base de pratique qui est plus populaire qu’on veut bien le dire. Par ailleurs, les golfs sont des acteurs de la vie locale, des outils d’attractivité des territoires. Dans les zones urbaines ils constituent des poumons verts et dans les zones plus rurales des lieux de loisir qui attirent la population. Chez les opérateurs de golf, plus de 70% de leurs fournisseurs sont locaux, ce qui fait vivre localement à travers des filières plutôt courtes… Les golfs sont des acteurs de l’économie à part entière.

AL : Un rapport benchmark fin 2022 indiquait que le chiffre d’affaires des golfs avait connu un bond de 5,1% par apport à l’an dernier. Mais vous pensez que nous ne retrouverons jamais les chiffres d’avant covid ?

LB : Le benchmark traite des chiffres d’affaires et pas des marges. Nous sommes effectivement à 5.1% d’augmentation uniquement sur le golf (hors restauration et hôtellerie) depuis 2019. Mais hors effet corrigé de l’inflation qui est plutôt à 8%. Si vous répercutez l’inflation sur les coûts, on n’y est donc pas. Dans le panier de l’INSEE l’inflation est à 5,8% mais la réalité dans notre filière est largement supérieure. Les salaires minimaux conventionnels, donc le SMIC de la profession, a augmenté de 7,1% en 2022 sur les trois premiers niveaux de qualification, et 6,4% sur les quatre suivants. Nous sommes donc au-dessus de l’inflation. L’énergie a triplé, les produits phytosanitaires et le sable ont augmenté de 30% environ, les carburants idem, mais aussi le coût des constructions pour les travaux. C’est donc considérable.

AL : La solution pour les golfs passe donc par une augmentation des prix ?

LB : Oui cela va être le cas. Pas seulement celui du green fee, mais aussi le prix moyen de l’abonnement. Chez Résonance, nous avons innové en 2022 en créant une segmentation de nos abonnements. Ils sont trois : Loisir, Plaisir, Passion. Ils ont des prix différents car ils proposent des prestations différentes mais permettent d’augmenter le panier moyen.

AL : Enfin, évoquons un sujet qui vous semble crucial, celui de la réforme des statuts des golfs.

LB : Cela illustre très bien selon moi la dynamique collective de la filière. La qualité des résultats que l’on a connu pendant le Covid, l’enjeu écologique, le besoin de parler d’une seule voix… l’ensemble de la filière doit porter le même message et l’unité sera d’autant plus forte et légitime quand elle sera statutairement pérennisée. Cette réforme, qui figurait dans le programme de Pascal Grizot, au-delà de remettre à niveau des statuts associatifs, consiste à donner les mêmes droits et devoirs à l’ensemble des gestionnaires de golfs quelle que soit la forme juridique de leur entreprise. Aujourd’hui, il n’y a que les présidents d’associations sportives qui votent aux résolutions soumises en assemblée annuelle à la Ffgolf. Ces associations sont dans un tiers des cas gestionnaires – ce qu’on appelle les golfs associatifs – et dans deux tiers des cas elles sont non gestionnaires. Donc le gestionnaire, celui qui investit, qui supporte les salaires, etc… on ne lui demande pas son avis ou en tous les cas sa parole n’est pas institutionnalisée. Ce projet validé par le comité directeur de la fédération en décembre dernier vise à donner des voix aux gestionnaires. Il y a d’ailleurs un sujet intéressant qui concerne le fait que les joueurs dans les golfs commerciaux ne sont pas forcément licenciés. Dans un golf associatif, il est obligatoire pour les joueurs de prendre une licence. A travers la licence, ils participent ainsi à la dynamique et au financement de la filière. Dans les golfs commerciaux on peut jouer sans être membre d’une association sportive, mais seulement en étant adhérent (abonné) au golf en achetant un green fee. C’est donc un sujet essentiel de générer plus de licences, donc davantage de ressources pour la fédération, ce qui lui permettra de recruter davantage d’experts sur les questions de l’eau, du gazon, d’aider les clubs. C’est aussi pour cela que cette réforme est très importante.

Fin